Comment apprivoiser un taureau en Espagne

Corrida_0019En vacances, il arrive parfois que l’on agisse comme un imbécile. Il n’y a pas si longtemps de ça, des amis m’ont persuadé de les suivre dans des arènes espagnoles où les toréadors s’entraînaient. Ils m’avaient assuré qu’il n’y avait aucun danger, les taureaux étaient jeunes et il ne leur arriverait rien. Mais ils ne m’avaient rien dit quant à la sécurité des acteurs dans l’arène. Et puis j’étais là uniquement pour une fille qui se trouvait dans le public ….

J’étais célibataire et j’avais cet âge où les hormones travaillent en permanence, surtout pendant les grandes vacances. Les campings en Espagne sont parfaits pour flirter. Le soleil, la plage…. et plein de jolies filles qui n’attendent que vous. Donc, cap sur l’Espagne, la terre promise des histoires d’amour en camping.

La chance
Après quelques efforts en vain, la deuxième semaine semblait se présenter sous de meilleurs augures. J’avais remarqué une fille superbe. Pour l’aborder, je cherchais une façon de faire bonne impression et puis, un jour, une chance inattendue se présenta. Une excursion était organisée dans l’arrière pays, là où les toréadors s’entraînent au sérieux. Ils utilisent des petits taureaux, assez jeunes, qui ne risquent pas de sanctionner le faux pas d’un toréador par un aller simple pour l’hôpital. Après une démonstration, les touristes avaient la possibilité d’entrer à leur tour dans l’arène. On nous avait assuré que les taureaux ne risquaient rien et, de ce fait, nous y sommes allés. Pour moi, il y avait une autre raison d’entrer dans l’arène : cette fille qui participait aussi à notre excursion …

Le spectacle
Les taureaux avaient effectivement une taille raisonnable, mais pour un garçon de la ville comme moi, ils étaient assez grands. Donc, après la démonstration, le toréador invita les spectateurs. Qui d’entre vous osera ? Et je suis entré dans l’arène, avec un sourire nonchalant et huit autres braves garçons. Je n’avais pas peur, cela était peut-être dû à l’excitation car j’avais remarqué que cette fille s’était installée dans les gradins avec ses amies. J’imaginais que je n’avais qu’un mouvement athlétique à effectuer au moment opportun et que ce soir, elle tomberait dans mes bras. Chaque garçon était opposé à un taureau et, sous les « Olé ! » du public, il devait esquiver le taureau lancé galop. Quand mon tour fut venu, on me donna le rôle du « picador ». Habituellement, le picador plante deux lances pointues dans la nuque du taureau, mais j’étais ravi d’entendre que je pouvais le faire avec de simples bâtons de bois, sans pointes. Au début, le taureau ne semblait pas avoir envie de se ruer sur un autre pantin, mais après quelques petits coups portés par le toréador, la bête irritée s’élança à toute allure. Tel un chat, je sautais sur le côté tout en plaçant mes deux bâtons derrière la tête du taureau. Parfait ! Par contre, mon atterrissage était complètement loupé. J’avais glissé et j’étais tombé à plat ventre dans le sable. Le jeune taureau avait rapidement fait demi-tour et en une seconde, il s’était retrouvé au dessus de moi et me montrait son mécontentement en m’assénant des coups de tête et de sabot. Très professionnellement, le toréador écarta la bête de moi, mais seulement après un dernier coup de sabot dans la joue ! Aïe !

Epilogue
Je n’avais pas eu conscience des applaudissements, mais un peu plus tard, mes amis m’ont assuré que j’étais la seule personne dont les spectateurs se souviendraient. Bien que ma joue me fasse souffrir à en mourir, j’avais accepté d’aller passer cette soirée à la discothèque. Cette fille devait y être aussi, et elle était la seule raison de mon stupide comportement de cet après-midi. Oh, oui, elle était là … et elle dansait avec un autre garçon qui avait aussi pris part aux jeux dans l’arène ! Le monde s’écroulait ! Cette belle fille, en train de danser avec un tordu qui avait essayé de se comporter en homme, sans faire preuve de courage face à un tout petit taureau …

Mes amis ont pris soin de moi. Ils m’ont offert un verre avec une paille.
« Ca fait mal ? » m’ont-ils demandé, en faisant allusion sans doute à la joue douloureuse et non pas à la blessure intérieure. « Seulement quand je ris » ai-je répondu. Et rire, c’était la dernière chose à laquelle je pensais.




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